Prix Littéraire des Hussards

Eloge à Michel Déon, à l’occasion de la remise du “coup de Shako” des Hussards (13 mars 2013)

A quoi reconnait-on un hussard canal historique ? C’est très simple : c’est quelqu’un qui se défend vigoureusement de l’être et de l’avoir été. Souvenez-vous de cette année 1952 quand Bernard Frank, qui rêvait déjà de devenir un grand écrivain méconnu, fabriqua dans les “Temps modernes” de Sartre, pour les dézinguer, le mythe des hussards autour de Roger Nimier qui venait de publier le “Hussard bleu”, Antoine Blondin et Jacques Laurent. Un quatrième nom allait bientôt s’ajouter : le vôtre.
Or, aucun de ces quatre-là ne revendiqua jamais son appartenance à cette glorieuse cohorte. Nimier s’en fichait éperdument, votre ami Blondin était trop occupé à essuyer ses verres de contact, Laurent tricotait sa fortune avec “Caroline Chérie” sans une sympathie excessive pour Nimier. Enfin, vous-même, jeune auteur de “La Corrida”, vous vous demandiez ce que vous alliez faire en cette compagnie. J’ajouterai que pendant toutes ces années-là, il ne vous est arrivé qu’une seule fois de vous retrouver tous les quatre à une même table. Drôle de mousquetaires…
Quelques soixante ans plus tard, dès que l’on prononce le mot sacré de hussard, la bande des Quatre ressort immanquablement au galop et fouette cocher ! Vous avez beau faire le grognard, hussard vous avez été, hussard vous êtes et hussard vous resterez.

 

Christian Millau